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Tammam Alomar, Masyaf - Syrie. 1986  artiste visuel

En commençant avec le graphique design en 2004 avec des productions d'identités visuelles pour les entreprises et les campagnes publicitaires, et en me tournant vers des études de droit à l'Université de Damas en 2005, je me préoccupais des droits de l’Homme et de la nature de leurs violations.

Au début de la révolution syrienne en 2011, j’ai réuni ces deux thèmes sur un travail de production d'affiches politiques et de campagnes de sensibilisation, en utilisant de nombreuses techniques tels que le graffiti, la calligraphie arabe, le photomontage et le graphique. En tant que témoin et victime direct de violence, ces affiches avaient un impact direct par leurs contenus expressifs, leurs constructions et leurs couleurs.

Quand je suis arrivé en France en fin 2014, la prise de recul sur la situation de la Syrie était bénéfique pour mon travail artistique. Je me suis éloigné de l’expression de l’action direct vers l’expression conceptuel au cours de mes études d’Arts plastiques à l’Université de la Sorbonne depuis 2016 .

Je suis convaincu du rôle et de l'importance d'un travail artistique engagé. J’ai travaillé sur le corps humain et son symbolisme car il a une place central dans la scène syrienne. Ces détenus, ces martyrs, ces personnes torturées, ces personnes exilées et ces réfugiés se symbolisent en corps. Chacun d’entre eux portant sa propre différence mais ils sont unis dans la figure du corps violenté, compressé et épuisé.

Ainsi, je suis allé plus profondément vers la simplicité, comme pour présenter une vérité unique en utilisant moins de couleurs et de détails.

 

Doit-on traiter de la souffrance alors même que notre instinct nous pousse à détourner le regard ?
La dites “horreur” est en soi un témoignage puissant. Dérangeant par sa forme, il nous instruit pourtant par la trace qu’il garde, façonnant avec lui la mémoire collective de l’humanité.
Tout comme Otto Dix pouvait traiter le sujet des gueules cassées après le première guerre mondiale, je m’interroge à mon tour sur les traumatismes physiques et psychiques des victimes des guerres actuelles.

“Il faut montrer aux gens à quoi ils ressemblent, comment est la vie. Ils sont tellements intéressants et précieux, qu’ils méritent d‘être peints.” Otto Dix

Cette trace historique, si chargée émotionnellement, montre pour moi l’importance de traiter ce rapport particulier qui apparaît lors de la confrontation du spectateur avec la trace visuelle.

Nous sommes quotidiennement sujet aux partages d’images intenses. Elles nous montrent des personnes, souvent inconnues, et malheureusement parfois, familières. En pleine recherche de reconnaissance de visage, nous pouvons sentir les ombres de leur modelé nous rappeler leur présence. Et de la distance dites insignifiante entre des yeux ou des oreilles, de la forme de la tête ou de la longueur d’un corps, tout prend alors un sens nouveau, vital. Alors que ces portraits nous informent par le soulagement de l’identité, d’autres ne sont que des traces non identifiées. En temps de guerre, l’information est différente, distante. Ce n’est donc plus une simple reconnaissance d’un regard vide, mais un plongeon dans une sombre quête pour retrouver un être dans le chaos. Les images comme les corps sont dispersés. Elles se trouvent dans le flux d’image d’agences de presse ou de partages personnels, documentant à n’en plus finir, la mort de torturés.

Face à ces images, nous tournons instinctivement la tête. Mais il est naturel de rejeter la laideur. Ces portraits froids parfois sans yeux ou lèvres ne s’associent plus aux êtres humains. Ils virent peu à peu, et malgré eux, vers des fantômes inconnues, errants de manière instable.
Cette incapacité à pouvoir regarder ces images tragiques découle de ce sentiment d’empathie. Ici le visage photographié, déchiré par la lumière, démontre de ce passage, de ce conflit, à la fois de la perte de l’identité, et du certain malaise qui s’installe avec le spectateur. On ne sait plus ce qui est réel ou non, et l’on tente de se concentrer sur les traces d’humanité. Dans toute cette confusion, notre instinct nous invite à souhaiter une meilleure réalité, et en cherchant le regard perdu du sujet, on veut l’imaginer plus belle, plus juste.

Aux familles de ces victimes brisées, à tous ces chercheurs, qui chaque instant scrutent les images pour y retrouver des êtres chers. A tous ceux qui n’ont pas ou plus peur de chercher un visage dans tout ce massacre.

Tammam Alomar

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--Empathy Portraits

 

Ouverture / Opening: lundi à vendredi : 16h30-19h30